Quand le volcan gronde
article sur le scandale des prêtres pédophiles



     Un volcan entre en éruption et les cendres qu’il crache, obstruent l’espace aérien de l’Europe, paralysant tout le trafic international et, de proche en proche et jusqu’en Chine, c’est toute l’économie du monde qui en est affectée.

 

     Au même moment un autre événement secoue l’Europe et agite l’Église dans le monde entier, c’est le scandale des prêtres pédophiles. Pourquoi est-ce un scandale ? Premièrement parce que des adultes ont abusé de l’innocence et de la faiblesse des enfants pour satisfaire leurs pulsions. Deuxièmement parce que ces adultes étaient des prêtres qui, de par leur statut, jouissaient de la confiance de ces enfants et de leurs parents. Troisièmement parce qu’il apparaît que dans des cas plus nombreux qu’on ne l’aurait cru, les autorités ecclésiastiques qui ont eu connaissance des faits, ont tu l’affaire et quelques fois même ont couvert les prêtres coupables de pédophilie.


     C’est donc un drame triplement douloureux et destructeur pour les victimes qui ont souffert d’être violés par des hommes en qui ils avaient confiance et sans avoir de recours ni auprès de leurs parents qui ne les auraient pas crus car ceux-ci avaient toute confiance dans le prêtre parce qu’il est prêtre, ni auprès des autorités religieuses qui ont choisi de fermer les yeux sur le drame, laissant les victimes à leur triste sort.


     Il faut préciser tout d’abord que le viol sexuel n’est pas la seule forme de viol, il y a de nombreuses façons d’utiliser la confiance, le prestige ou l’autorité dont on jouit pour violer les consciences, avec tous les effets destructeurs que cela a sur les personnes, qui peuvent alors sombrer dans la drogue, la maladie ou la dépression. La plus grande tentation du prêtre, en effet, c’est la tentation du pouvoir. Les abus de pouvoir sont aussi graves que les abus sexuels car ils sont tout aussi dévastateurs même s’ils passent plus facilement inaperçus. (C’est peut-être pour cela que St Jean a remplacé, dans son évangile, l’institution de l’Eucharistie, par le lavement des pieds : Jésus lave les pieds de ses disciples pour leur faire comprendre que le pouvoir se pervertit s’il ne s’exerce pas dans un esprit de service.)


     Il faut préciser aussi que l’Église n’est pas le seul corps constitué où sont perpétrés de tels abus de confiance ou des abus de pouvoir de toutes sortes : cela arrive aussi dans l’armée, dans l’enseignement, dans les orphelinats… et même aussi dans les familles. Bien sûr, on voudrait croire que dans l’Église, les prêtres qui sont chargés d’annoncer l’Évangile, seraient à l’abri de telles défaillances. Mais il ne faut pas oublier que l’Église est faite d’hommes, avec leur générosité mais aussi avec leurs fragilités.


     Les médias ont raison d’orchestrer ce scandale pour donner de la voix aux victimes qu’on a trop longtemps voulu faire taire et qui souffrent non seulement du viol dont ils ont été victimes mais peut-être plus encore du fait que ce viol n’a jamais été reconnu. Cependant, en mettant l’accent sur les fragilités et les défaillances des prêtres, les médias risquent de nous faire oublier l’extraordinaire générosité de ces hommes qui n’ont pas hésité à consacrer toute leur vie au service de leurs frères. Ils risquent aussi de nous laisser croire que des cas d’exception sont la règle et que tous les prêtres sont pédophiles alors que l’immense majorité d’entre eux luttent tous les jours pour donner le meilleur d’eux même, en particulier aux enfants, pour les aider à construire un monde où ils seront heureux.


     Il faut insister aussi sur le fait que l’Église catholique qui s’est, au cours de l’histoire, rendue coupable de crimes d’intolérance, voire de persécution envers les personnes, a su par la voix de Jean Paul II, et aujourd’hui de Benoit XVI, reconnaître ces défaillances et demander officiellement et publiquement pardon. De plus le Pape, Benoit XVI, en dépit des maladresses qu’on a pu lui reprocher, veut être le pape de la transparence, un pape qui demande à tous les évêques de renvoyer désormais tout prêtre pédophile devant la justice.


     Il faut insister encore sur le fait que la fragilité humaine des membres de l’Église ne saurait, en rien, diminuer la vérité et l’importance du message qu’ils sont chargés d’annoncer au monde. Il faut s’émerveiller au contraire de ce que ce message ait pu se transmettre de génération en génération malgré cette fragilité des hommes et malgré toutes les défaillances de l’Église. Et si cela a été possible, c’est sans doute à cause de la qualité du message, de l’action de l’Esprit Saint… et peut-être aussi grâce aux mérites de l’Église que les médias oublient trop souvent de signaler. En effet, comment serait le monde s’il n’y avait eu et s’il n’y avait l’Église ?


     Enfin pour comprendre l’Église, il faut se souvenir qu’à l’origine, Pierre a trahi Jésus, par trois fois, et pourtant Jésus lui a conservé sa confiance et c’est à lui qu’il a confié son Église. Si Pierre avait été un prêtre pédophile, Jésus, tout en condamnant la faute, lui aurait-il pour autant retiré sa confiance ? Et si nous lui avions amené un prêtre pédophile, comme les juifs lui ont amené un jour une femme adultère que la loi de Moïse condamnait à être lapidée, ne nous dirait-il pas aussi : « Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché (ne serait-que dans le secret de sa pensée) lui jette le premier une pierre. » Et au prêtre pédophile, ne dirait-il pas, comme à la femme adultère : « Moi non plus je ne te condamne pas, va et ne pèche plus. »


     Il nous faut donc comprendre la position délicate de l’Église dans le monde, car elle doit à la fois satisfaire au besoin légitime de justice pour les victimes et se soumettre comme tout le monde aux exigences de la loi, et en même temps, répondre à l’appel du Christ qui nous demande d’aimer aussi le pécheur et de lui pardonner.

 

     Ainsi le scandale des prêtres pédophiles n’est pas aussi simple qu’il y parait à première vue, car les « méchants » aussi souffrent du mal qu’ils ont fait. Et seul l’amour peut calmer le volcan qui gronde dans leur cœur et aussi dissiper les cendres noires qui ne cessent de tomber et de retomber dans la vie de leurs victimes.

 

                                                                                                  Gérard Pique

 

 

                                                                                                                                                                                                                                                                                           

Article publié par Pique • Publié le Dimanche 16 mai 2010 • 15988 visites

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